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LA MAISON AUX VISAGES
Un texte de Vincent Willaime
Parmi toutes les histoires plus ou moins « incroyables » ou paranormales qui circulent de par le monde, celle connue ous le nom « la maison aux visages » est sans doute une des plus énigmatiques. Le phénomène, qui dura une trentaine d’années, a pu être observé par des centaines de témoins divers, a connu un fort écho dans les médias, et a pu être étudié et confirmé par des scientifiques appartenant a des spécialités diverses, sans pour autant que l’on ait obtenu des explications satisfaisantes.
APPARITIONS DE VISAGES DANS LE CIMENT D’UNE MAISON
L’affaire commence en 1971 dans le petit village andalou de Belmez de la Moraleda. Très exactement, au numéro 5 de la rue Rodriguez Acosta, une petite maison ancienne et modeste où vit la famille Pereira. Le 23 août au matin, Maria Gomez Pereira vaque à ses occupations ménagères, lorsqu’elle voit des traces au sol de sa cuisine, qu’elle pense être des taches. En y regardant de plus près, elle découvre avec stupéfaction qu’elles représentent le dessin d’un visage humain, qui se forme progressivement pour apparaître de plus en plus distinctement. Elle appelle immédiatement son mari et son fils. Ils confirment distinguer également une forme humaine et qu’elle n’est pas victime d’hallucinations. Plutôt inquiète, la famille quitte les lieux et va se réfugier chez des voisins, qui d’ailleurs pourront témoigner plus tard du phénomène.
Le 1er visage apparu (dimension : 40 cm x 60 cm).
Quelques jours plus tard, remise de ses émotions, la famille revient dans sa maison et décide d’abord d’effacer simplement cet étrange dessin, et de tenter de reprendre une vie paisible comme si rien ne s’était produit. Mais comme les divers détergents utilisés n’y font rien, ils prennent alors la décision de démolir la dalle de ciment et d’en couler une autre. Plus rien ne se produit pendant un certain laps de temps, mais le 8 septembre, le même visage réapparaît au même endroit, sur la nouvelle dalle de béton… Cette fois-ci, les Pereira commencent à être vraiment inquiets, et ne sachant pas comment se débarrasser de cette « chose », ils contactent les services de la mairie. L’histoire commençait inévitablement à faire parler d’elle dans le village, aussi la municipalité décide de récupérer le bloc de ciment en question, et ordonne des investigations, pour tenter de comprendre cet étrange phénomène, ou bien pour mettre à la lumière une éventuelle supercherie. Les autorités de Belmez font sortir les habitants et fermer la maison.
CONSTRUITE SUR UN CIMETIERE
En poursuivant leurs recherches, les services de la mairie creusent le sous-sol de la cuisine, sur une profondeur de trois mètres. Ils pensaient y trouver des photos enterrées, qui auraient pu être la cause de l’apparition des images par une sorte de phénomène d’émulsion. Mais en guise de photos, ils mettent à jour des ossements humains. La maison, qui a été bâtie au 19ème siècle, est située sur un très ancien cimetière, ainsi que celle d’à côté et une partie de l’église. Ce cimetière a été d’abord romain, puis musulman, et enfin chrétien. Plusieurs corps, dont deux sans tête, ont été découverts. Bien que la vieille ville date du 15ème siècle, la datation au carbone 14 a relevé que certains ossements dataient du 13ème siècle. Pensant avoir définitivement identifié la cause du problème, les corps furent inhumés dans un autre cimetière, et convaincus que les « esprits » seront dorénavant apaisés, une nouvelle dalle de ciment est coulée dans la cuisine, et la famille est autorisée à rentrer chez elle.
Peine perdue, de nouveaux dessins apparaissent peu de temps après, mais cette fois, à plusieurs endroits de la cuisine et même dans d’autres pièces de la maison, des hommes, des femmes, des enfants, des visages parfois accompagnés de troncs ou de mains… Cette fois-ci, la terreur s’empare de la famille. Dans le village, où l’histoire est désormais dans tout les esprits, tout le monde veut savoir ce qui se passe. La curiosité se mélange aux craintes des habitants abasourdis par ce phénomène étranges et inquiétant, et une foule de visiteurs afflue sans cesse à la petite maison. Certains affirment que des visages se sont formés sous leurs yeux. Les dessins étaient effectivement changeants : il arrivait que certains visages apparaissent et disparaissent au cours de la même journée, et ils pouvaient même parfois changer d’expression. Bien souvent, il y a tellement de monde que Maria ne peut même plus accéder à sa cuisine, et la Guardia civile doit intervenir pour calmer l’excitation des badauds !
La presse s’empare du sujet et rapidement toute l’Espagne est informée. Dès l’année suivante, la maison, présentée au public comme « la casa de las caras », « la maison des visages », est même ouverte aux touristes. Le phénomène connait une amplification constante, et en tout, ce sont quelques trois mille visages différents qui ont été comptabilisés pendant trente cinq ans, le décompte précis ayant été établi par un notaire, Don Antonio Palacios Luque. Les visages présentent des grandes variétés stylistiques : certains ne sont que des taches à peine discernable alors que d’autres sont très nets. Des rumeurs prétendent que les visages semblent changer d’expressions au gré des humeurs de la maîtresse de maison, notamment lors d’un séjour à l’hôpital de celle-ci, pendant lequel les visages auraient affiché une expression de tristesse. On pense évidemment à un énorme canular, surtout que le fils des Pereira, Miguel, est un artiste…
EXPERTISES SCIENTIFIQUE
Après les journalistes et les touristes, ce sont des scientifiques convoqués par le gouverneur de la province qui s’intéressent à cette histoire, que certains n’hésitent plus à présenter désormais comme « le mystère du siècle ». Des spécialistes de plusieurs universités européennes er américaines ont tenté de trouver des matières chimiques (peinture, teinture, nitrates, chlorures, sels d’argent, etc.), mais sans succès. Tests de radioactivité, de rayons X, de détection de matières orgaaniques, photographies àl ‘ultra-violet, à l’infra-rouge, tous les tests possibles ont été effectués sur les visages, mais rien ne parvient à démontrer une quelconque supercherie ni à trouver une explication au phénomène, et le mystère reste entier. La pauvre Maria a même été soumise à un détecteur de mensonges, sans qu’on puisse en tirer quelque chose de probant.
Maria Pereira interviewée chez elle sur les faits.
Pendant l’année 1972, les para-psychologues German de Argumosa et Hans Bender se rendent sur les lieux. Ils sont effectivement témoins des phénomènes d’apparition, de disparition, puis de réapparitions des visages. Ils recouvrent les visages d’une bâche en plastique et font sceller la cuisine pendant trois mois, pour vérifier une éventuelle supercherie. La salle est divisée en sections, pour mieux percevoir d’éventuels changements, et de nombreuses photos sont prises.
DES VOIX…
Les trois mois passent, et lors de la réouverture, les para-psychologues constatent que plusieurs visages se sont déplacés et que de nouveaux sont apparus (17 pour être exact). Ils pensent finalement à effectuer des tests de transcommunication instrumentale (TCI) et ils installent des micros dans les pièces. A leur surprise, les appareils détectent des sons, qui étaient inaudibles à l’oreille humaine. Ce sont des voix d’hommes, de femmes, d’enfants, des plaintes, des gémissements, des pleurs, des cris… Parmi les nombreuses phrases qui ont pu être identifiées, notons celles-ci :
Angela
L’enfer commence ici
Je continue, enterré
Ils sont tous morts
On souffre
Maria, je veux partir
Les voix prenaient même part aux conversations qui avaient lieu dans la pièce, même si elles n’étaient pas entendues sur le coup. Par exemple, lorsque l’enquêteur Pedro Fernandez a interviewé Isabel, la nièce du couple Pereira. Isabel a affirmé qu’elle croyait que les visages apparaissaient parce que les âmes sans repos des morts cherchaient « quelque chose ». Sur l’enregistrement, on entend une voix répondre « justice ». Sur un autre enregistrement, l’enquêteur Pedro Amoros, président de la Sociedad Espanola de Investigaciones Parapsichologicas (SEIP), suggère à Maria Pereira de s’adresser tout haut aux « forces » responsables des apparitions de visages dans sa maison. Maria s’exécute et demande : « pourquoi avez-vous choisi ma maison ? », et sur l’enregistrement, on peut entendre la réponse : « c’est un abus ».
Les enquêteurs se sont demandés si leur propre subconscient pouvait être à l’origine des voix qui étaient entendues sur les enregistrements. Ils ont tenté une expérience : chacun devait répéter mentalement une phrase dépourvue de sens, soit : « je veux aller sur Vénus ». Le résultat fut des plus surprenants. Les voix enregistrées disaient : « nous devons aller sur Vénus ».
AUTRES EVENEMENTS PARANORMAUX
La maison a été habitée par la même famille pendant plusieurs générations. C’est ainsi qu’en 1858, alors que les grands-parents maternels de Juan Pereira habitaient l’endroit avec leur fille de 9 ans, des cris et des pleurs furent entendus. Ils provenaient du grenier. Aucune explication logique ne fut trouvée pour expliquer ces bruits. Dans la maison voisine, située au numéro 3, des voix et des murmures ont été entendus au fil des années. On a aussi noté des évènements de type poltergeist, comme des cadres tombés ou des meubles qui changeaient de place. Il y eut aussi une époque où ces déplacements de meubles causaient de sérieux problèmes aux occupants car les objets déplacés bloquaient la porte qui donnait accès sur la rue. Le professeur Hans Bender lui-même a mentionné que lorsqu’il était dans la maison des Pereira, il lui est arrivé de sentir que quelqu’un lui touchait la nuque.
SECONDE VAGUE D’APPARITIONS
En 2004, Maria Gomez Pereira décède à l’âge de 85 ans. Pedro Amoros entreprend une nouvelle campagne de recherche de visages à Belmez. Isabel met alors à jour de nouveaux visages dans la maison natale de sa tante défunte, située à 200 mètres de la maison de famille des Pereira, où les visages originaux étaient apparus en 1971. La SEIP affirme que les visages découverts sont bien authentiques. Cependant, ce dernier phénomène a été identifié et reconnu de façon quasiment unanime comme étant une vaste supercherie. La SEIP aurait œuvré en complicité avec la municipalité de Belmez. Cette dernière souhaitait ouvrir un musée consacré aux visages de Belmez, et à cet effet, elle voulait racheter la maison où les Pereira avaient vécu et où les phénomènes paranormaux s’étaient manifestés. Cependant, le prix de la maison était prohibitif, et l’objectif de ce canular était de faire apparaître des nouveaux visages dans une autre maison, dont le prix aurait été moins élevé, et d’y créer le fameux musée. La SEIP aurait réalisé les visages et les aurait authentifié par la suite pour le compte de la mairie, l’avis de la nièce de Maria Pereira servant de caution familiale à la découverte.
TENTATIVES D’EXPLICATIONS
L’affaire, qui reste connue sous le nom de « mystère du siècle », est loin de faire l’unanimité quant à l’authenticité de ses phénomènes. Les éléments recueillis par Argumosa et Bender ne permettent pas d’affirmer l’hypothèse paranormale mais ne démontrent pas non plus qu’il s’agit d’une supercherie. En outre, les deux parapsychologues ne publièrent aucun document officiel sur leurs observations, et Bender en parla à peine dans la publication de son institut, Zeitschrift für Parapsychologie. Pour quelles raisons ? Le mystère s’ajoute au mystère…
L’HYPOTHESE DU CANULAR
L’hypothèse d’une fraude est recoupée par plusieurs faits. La supercherie de la vague d’apparition de 2004 a été démontrée, ce qui a jeté le doute sur l’authenticité des visages apparus depuis 1971. Les visages créés par la SEIP ont été réalisés en humidifiant le béton, puis en recouvrant la tache d’une mince couche d’huile d’olive, de façon à ce que celle-ci s’estompe petit à petit au fil du temps. Quelques uns des visages originaux auraient pu avoir été réalisés à l’aide de cette technique, et dès les premières apparitions, le fils Pereira, Miguel, a été parfois accusé d’avoir monté toute l’affaire, dans un but de reconnaissance ou d’argent. Un peintre local a également été soupçonné d’être le possible auteur des visages, mais rien n’a pu être démontré en ce sens.
Plusieurs études ont été menées sur les visages, en plus des premières observations vaines effectuées en 1971. En 1990, des analyses menées par le très respectable Institut de la Céramique et du Verre de Madrid (ICV) sur la composition chimique d’échantillons issus de deux visages n’a identifié aucune trace de peinture. Mais cette étude reste considérée comme discutable car elle n’indique pas sur quels visages les échantillons ont été prélevés. Un chercheur mexicain, Luis Ruiz-Noguez, affirmait par contre, dans un article édité en juillet 1993 dans le journal de la société pour la recherche psychique, que la présence de plomb, de chrome, et de zinc, était caractéristique d’un pigment. Une dernière étude, menée par un chercheur du Haut Conseil de Recherche Scientifique d’Espagne, se termine par une conclusion ambiguë, sans qu’on en apprenne davantage sur la nature des visages. Beaucoup de détracteur ont affirmé que le but de la famille Pereira était de se faire de l’argent en inventant de toutes pièces cette histoire, mais la seule chose que Maria ait vraiment obtenue est qu’une nouvelle cuisine lui soit construite, adjacente à la maison. Celle-ci, en vente depuis son décès en 2004, n’a d’ailleurs toujours pas trouvé d’acquéreur, mais elle est toujours habitée… par ses étranges visages !
EXPLICATION NATURELLE
Apparition du diable sur un carrelage chez un particulier
Des problèmes liés à l’humidité excessive de la maison ou au dépôt de certaines substances de cuisine sur le ciment brut (huiles, graisses) auraient provoqué l’apparition de taches sur le sol. Le phénomène de paréidolie aidant, les gens auraient cru y percevoir des visages. L’obsession de la famille Pereira pour ces visages aurait influencé les témoins du voisinage, qui auraient également fini par se persuader qu’il s’agissait bien de visages.
L’expérience de Hans Bender, qui se félicitait d’avoir fait constater sous scellés que certains visages avaient changé d’aspect, peut être expliquée par le fait que les taches sur le ciment sont susceptibles de se modifier d’elles-mêmes, grâce aux changements de température ou d’hygrométrie. Cette explication n’est cependant valable que pour certains visages de Belmez, qui sont peu- voire à peine- discernable sur les photos et pourraient n’être qu’un simple effet lié à la disposition au hasard de taches d’humidité sur le béton. Mais les visages les plus complexes sont nettement reconnaissables et écartent l’hypothèse de la paréidolie. Quant aux voix enregistrées, elles pourraient en réalité être liées à la réception d’ondes radio parasites ou venir de l’extérieur en étant répercutées par la disposition des murs. Un autre argument en faveur de cette hypothèse est la présence d’eau souterraine, qui pourrait être à l’origine de l’humidité responsable de l’apparition des taches et provoquer des bruits semblables à des voix.
L’HYPOTHESE DE LA TELEKINESIE
Cette hypothèse est avancée par certains chercheurs. La télékinésie, ou psychokinésie, est la faculté de déplacer ou influencer des objets à distance, par la pensée. Elle peut se produire de façon inconsciente. Dans le cas des visages de Belmez, les enquêteurs notent que la combinaison de trois éléments particuliers permettent le phénomène :
a- Un taux élevé d’humidité
b- Le plancher en ciment
c- Un humain réceptif.
Maria Pereira aurait donc été ce médium, ce qui semble renforcé par le fait que les visages changeaient d’expression selon son humeur. Elle aurait pu être elle-même à l’origine de ces visages, en les créant par la « force » de son esprit, de façon similaire aux phénomènes de type Poltergeist. C’est apparemment la thèse qu’ont privilégié Argumosa et Bender pour justifier ce lien mental entre l’habitante de la maison et les visages. Cette hypothèse a gagné en crédibilité depuis la mort de Maria, car le phénomène a alors brusquement cessé.
EXPLICATION SPIRITE
Les visages de Belmez seraient ceux des défunts enfouis dans le cimetière de la ville. Les arguments les plus fréquemment avancés en faveur de cette hypothèse sont :
-La présence du cimetière et de restes humains,
-le fait que les images résistent à la destruction de leur support en ciment, leurs changements de lieux, et d’expressions,
-les enregistrements réalisés par la méthode « TCI ».
Des recoupements ont été faits avec les terribles évènements de la Guerre civile espagnole (1936-1939), une période sombre de haines politiques et sociales où de nombreux civils sont massacrés. Les squelettes retrouvés sous la maison Pereira seraient-ils ceux de personnes assassinées, torturées et même décapitées pour certaines ? Ces visages seraient-ils des témoins de l’histoire qui cherchent à attirer l’attention sur un drame qu’ils auraient vécu ? En Espagne, où le souvenir des horreurs de la guerre civile est encore vivace, certains le pensent, mais la plupart préfèrent l’ignorer. En creusant le sous-sol de la maison, les enquêteurs auraient effectivement retrouvé des photos de personnes assassinées durant cette période…
Source- revue Monde Etranges n°12 de juillet 2011 par V. Willaime